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Réflexion impulsive sur l'industrie de la musique au Québec
Marc-André Laporte comment 9 Comments

Pas une journée cette semaine où mes yeux ne se sont pas posés sur un texte ayant comme sujet la fragilité de la musique québécoise. Il y a eu le Forum sur la chanson québécoise, ce texte d’Alain Brunet et surtout, mille points de vue différents à l’heure du lunch.

Je suis zéro en redevances et subventions. Mon truc, c’est le marketing. Je n’ai pas de misère à voir que l’industrie de la musique perd peu à peu son statut d’industrie. Partout les maisons de disques fusionnent, les ventes diminuent et une industrie parallèle fait son chiffre d’affaires en vendant des conférences et des panels qui servent de diachylon temporaire à tous ces nostalgiques du CD à 21,99$ chez Sam the Record Man. Quand Goliath est ébranlé, j’imagine que David doit être solidement déstabilisé.

Le Québec est un petit marché. Il est encore plus petit maintenant que nous avons encore plus de choix. Dans mes jeunes années, je mangeais ma soupe Lipton devant Les Pierrafeu à midi. J’avais deux ou trois autres choix, mais je m’arrêtais sur TQS. Si les Pierrafeu étaient toujours présents à la même case horaire aujourd’hui, je passerais sûrement mon trente minutes à zapper une centaine de canaux. Bienvenu dans le monde de la musique et la démocratisation de l’art en général.

Comment allez-vous amis cinéastes Québécois? Et vous les écrivains? Est-ce que le problème vient de l’industrie ou tout simplement de notre petit village? Arrêtons de tourner autour du pot, nous sommes limités. Moins de portée, mais plus de choix. Plus de mains dans le sac et une multiplication des micros transactions.

Quand on se questionne à savoir pourquoi les musiciens québécois sont retissant à mettre leur musique accessible gratuitement le Web, la réponse me semble évidente. Disons que le taux de conversion « écouteur vers acheteur » est de 10% sur Bandcamp (je dis un chiffre au hasard), le 90% fait peur au band local. Pour Black Sabath (je dis un nom au hasard), aller chercher 250 000 écoutes sur Bandcamp n’est pas un énorme défi et le 10% représentera un montant significatif. Ici, c’est un succès si on tape le chiffre magique de 1000 lorsqu’on met un nouveau vidéo en ligne.

Lorsque l’on donne accès à notre album et que l’on fait une vente sur Bandcamp, ce n’est pas la musique que l’on vend, c’est sa portabilité.

Je peux comprendre la stratégie d’offrir 2-3 chansons en espérant concrétiser une vente par la suite. C’EST EXACTEMENT COMME ÇA QUE L’INDUSTRIE DE LA MUSIQUE A FAIT SON ARGENT EN NOUS VENDANT DES ALBUMS OÙ LA MOITIÉ DES CHANSONS TOUT SIMPLEMENT MAUVAISES.

Même si l’Internet à briser les barrières physiques, comparer un groupe local à un groupe international ou un groupe francophone à un groupe anglophone, c’est comme comparer une licorne à un poney. La stratégie de Misteur Valaire n’est pas comparable à la stratégie de Radiohead.

Misteur Valaire n’est pas non plus comparable à n’importe quel musicien. Ils ont donné leur musique en offrant un produit facilement accessible pour ne pas dire consommable partout sur la planète entière et ils le savaient. Ce sera un tout autre défi sur vous sortez un maxi de musique acadienne.

Et les services de musique en continu ont-ils leur place au Québec ? Si on en vient au constat que le premier chèque qu’un artiste reçoit de Spotify voit le jour lorsqu’il approche les millions de chansons jouées, on devra s’armer de patience. Je comprends la stratégie de ZIK.ca, 20% des musiciens s’en sortiront avec une compensation, mais je doute que cette option soit considérable pour l’autre 80%. De toute façon ils n’apportent pas de valeur au service.

L’objectif en ce moment pour les musiciens n’est pas uniquement de faire de la bonne musique, c’est d’attirer l’attention. Je crois qu’il vous faudra être réaliste dans vos objectifs. Viser 50 000 ventes, c’est brûler temps et énergie. À partir du moment où nous assumerons que nous sommes au Québec et que de convertir 1000 personnes en 1000 fans est un exploit, on pourra adapter les stratégies. Voilà pourquoi je crois à l’option freemium to premium. La conversion entre la conquête et la fidélisation.

Est-ce que la musique au Québec devra se nicher davantage et arrêter d’attendre l’argent du gouvernement?

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  1. Salut,

    Je ne comprends pas très bien ce que vous vouliez dire par le point mentionner ici : Disons que le taux de conversion “écouteur vers acheteur” est de 10% sur Bandcamp.

    Merci

      1. Ce pourcentage est-il le même si l’artiste choisi de laisser le choix à l’auditeur s’il payera le montant de son choix ou non pour le téléchargement?

  2. Merci.

    Je suis en général d’accord avec vos points de vue.

    La question n’est pas de savoir qui mérite plus d’attention des francos Vs anglos ou autres, mais c’est un point de vue de disponibilité des récepteurs.

    Oui, le bassin québécois est petit pour acheter/vendre/produire de la musique, mais dans ce même bassin, la communauté qui la consomme est également restreinte.

    Pourtant la population qui consomme de la musique va en grandissant.

    Un des problèmes soulevés lors du Forum sur la chanson, est l’éducation musicale. C’est, selon moi, anormal que les jeunes écoutent de la musique américaine et qu’il faut un film comme Dédé à travers les brumes pour qu’ils se disent: Hein, c’est qui ce mec?

    Il y a définitivement un fossé à quelque part. L’idée n’est pas de savoir à qui la fautes (les parents, l’industrie, les médias, la société) mais comment y remédier?

    1. Est-ce que le population ne consomme-t-elle pas plus de musique car celle-ci coûte moins cher ou est tout simplement facile à voler? Je crois que si la pizza à 0,99$ devenait gratuite, les gens en consommeraient beaucoup plus. Seul les vrais fans de pizza continueront de payer le plein prix chez Magpie.

  3. Petite réflexion rapide…

    On parle rarement du « déplacement de l’argent » et je comprends difficilement pourquoi car cela explique en grande partie le manque à gagner des industries culturelles québécoises :
    « De 1997 à 2009 […] en 12 ans, la part des produits d’accès dans les dépenses culturelles des ménages est passée de 34 % à 55 %, alors que celle des produits culturels suit le chemin inverse, passant de 57 % à 39 %. »
    http://www.stat.gouv.qc.ca/salle-presse/communiq/2012/mai/mai1231.htm

    On aura beau chercher toutes les solutions du monde, si les gens n’ont plus d’argent… Et lorsqu’ils en ont, ils doivent dépenser 200$ pour voir un artiste « international ». Que leur reste-il pour la culture québécoise?

    De plus, les données démontrent que les jeunes (en bas de 25 ans) écoutent de moins en moins la radio. Ceux-ci se tournent vers YouTube et cie pour écouter de la musique. Il n’y a pas de quotas sur YouTube, cette génération n’est plus exposée « de force » à la musique francophone. Notre culture disparaîtra tout simplement parce qu’elle n’aura pas su offrir un produit de masse similaire aux produits de masse anglophones. Idem pour la scène underground…

    Le modèle Freemium est pertinent mais il s’agit d’un élément auquel on doit ajouter une image de marque forte et une qualité irréprochable du produit (peu importe le créneau musical)…

  4. Pour poursuivre le point suivant abordé par Alexandre;

    « Il y a définitivement un fossé à quelque part. L’idée n’est pas de savoir à qui la fautes (les parents, l’industrie, les médias, la société) mais comment y remédier? »

    En effet. Et oui ça devra passer par l’éducation.
    Parce que pour être honnête la solution magique « Donne ta musique » n’est pas particulièrement aboutie comme solution en soit.

    Ok, demain matin la musique ne coûte plus rien. J’imagine qu’à assez court terme, on ne produit plus vraiment de copie physique d’albums (même de ceux dont toutes les chansons sont bonnes, car oui, ça existe, beaucoup même).

    Et ensuite?

    Honnêtement, ta pizza à 0,99$ qui devient gratis, si j’en mange à outrance, je vais m’écoeurer. Et je ne vois pas pourquoi ça serait différent avec la musique.

    Oui, ça simplifierait le travail d’éducation j’imagine. Si pour découvrir tous ces artistes que tu ne connais pas, tu peux en tout temps downloader un fichier ZIP de son dernier album, single, etc. Mais au bout du compte, tu vas l’écouter combien de fois cet album, qui trouve sa place parmi les 24 000 que tu as téléchargé dans la dernière année? Parce qu’après tout c’est gratuit, pourquoi te priver?

    Je suis vraiment ambivalent sur le sujet. Je sais que c’est bénéfique à plein de niveaux. Mais l’éducation, elle peut pas juste passer par là. Ça me fait rire à quel point on va juste tout mettre gratuit mille fois avant de questionner le travail que les radios ne font plus. Les radios ne te font plus découvrir d’artistes? Donne ta musique, fais la découvrir toi même.

    C’est juste qu’éventuellement, dans 25 ans, on va dire la même chose pour les spectacles si on suit cette logique.

    L’éducation doit passer par diffuser la musique (10 tounes différentes au lieu de 10 fois la même toune plate). Je pense qu’elle doit aussi passer par reconnaître la valeur d’une oeuvre et y sensibiliser les gens.

  5. Je suis moi-même un musicien qui fait une musique instrumentale et je n’ait pas l’intention de faire de spectacles. Il me reste alors l’option de vendre mon travail et de possiblement être joué à la radio. Donc, donner ma musique n’est pas une option valable.

    Personnellement, j’écoute beaucoup de web radio, et si je compare à ce que je peux trouver sur youtube, les groupes marginaux ou émergents (qui sont parfois excellents) ne sont pas ou très peu diffusés sur ces radios. Je conclus qu’ils n’auront donc aucune redevances, une deuxième option à oublier dans mon cas.

    Je fais aussi beaucoup de recherches sur Youtube et de belles découvertes mais… sur une vingtaine de groupes, si je découvre un artiste valable c’est de la chance. Je dis bien « artiste valable » puisque plusieurs artistes ont quand même une bonne pièce ou deux. Par contre, pour moi ce n’est pas des artistes qui ont de la profondeur, ce sont des gens qui ne feraient pas de musique (ou dans leur sous-sol seulement) si l’équipement d’aujourd’hui n’était pas si abordable et si Youtube n’était là pour eux.
    La question qui me vient en tête c’est: comment se faire voir sur Youtube à travers toute cette pollution de groupes sans saveurs ?
    Youtube est pour moi une autre option qui est obligatoire oui, mais non fiable, sans compter le fait que il évolue constament.

    Il me reste donc les radios. Parlons-en de ces radios, les seuls qui sont réellement disponibles et assez courageuses pour jouer les artistes émergants sont les radios universitaires, qui sont eux aussi pris avec des quotas de diffusions. Personnellement, je crois que la règlementation radiophonique est depuis trop longtemps un frein à la diffusion de musique originale et différente. En 2013, c’est un avantage de faire de la musique francophone oui, mais je crois aussi que la prolifération de toutes ces nouvelles radios est la
    preuve que les gens ont envie de choisir ce qu’ils aiment écouter, et ce n’est pas seulement que de la musique francophone ou américaine. C’est avant tout de la musique de qualité que nous devrions prévilégier.

    La quantité d’artistes est phénoménale, la quantité de consomateurs l’est tout autant, les modes de diffusions sont multiples et la musique n’est plus produite et consommée de la même façon qu’autrefois. Tout tend à se stabiliser, esperons que l’industrie ne tuera pas sa source (l’artiste).